Des vacances côté nature en Hautes-Alpes
Depuis longtemps, je voulais emmener Brian et les graines de chêne à la découverte des Alpes. Plus précisément, à la découverte de la vallée de la Clarée, près de Briançon, où je passai des vacances en famille inoubliables il y a quelque trente ans de ça. Mon souhait s’est enfin exaucé cet été, avec un séjour de camping et de rando et de baignade sauvage qui a surpassé toutes nos attentes.
** Attention – cet article est épique ! **
En camping dans les Alpes
Munis d’une tente neuve et de matériel de camping emprunté de ci de là auprès de ma famille, nous avons planté de le camp pour cinq jours au camping Huttopia La Clarée, dans la vallée éponyme au nord de Briançon. Cinq jours pour des vacances de rêve côté nature dans les Alpes.
A pied et à la nage en vallée de la Clarée
L’eau a coulé sous les ponts depuis notre premier été de baignades sauvages en France, il y a deux ans. A l’époque, se baigner vite fait dans une rivière peu profonde ou dans un plan d’eau surveillé nous paraissait une belle réussite. Désormais, nos baignades sauvages sont devenues… un peu plus sauvages. Nous sommes meilleurs nageurs, et plus aventureux aussi.
Si remonter à la nage une gorge de l’Ardèche à partir du pont du Diable de Thueyts, nager dans le lac en forme de cœur de Wicklow, et ma toute première baignade atlantique dans le comté de Cork furent sans doute nos plus belles réussites aquatiques de l’année 2018, cet été nous a vu fracasser notre record d’altitude.
En cinq jours dans les Alpes, nous avons engrangé deux superbes randonnées et plusieurs baignades dans de sublimes lacs de montagne, dont deux à des altitudes respectives de 2359 et 2504 mètres !
Alors voici, du plus bas au plus haut, cinq splendides lieux de baignades dans les Hautes-Alpes.
Contents / Sommaire
1. La Roche-de-Rame
“Superbe lac à l’eau lumineuse et avec un arbre pour sauter.”
C’est ainsi qu’est décrit le plan d’eau de la Roche-de-Rame dans le livre Baignades Sauvages en France (lien partenaire), le tout illustré par de belles photos de ladite eau lumineuse. Seulement voilà, le ciel était légèrement couvert quand nous y sommes arrivés. Malgré tout, le parking était plein et le rivage bondé de familles en quête de fraîcheur.
Alors que la plupart des adultes se contentaient de regarder pendant que leurs enfants s’ébattaient dans l’eau fraîche, nous nous sommes tous jetés à l’eau, admirant au passage la vue sur les montagnes alentour.
Mont-Dauphin
Mais l’affluence, et le besoin de trouver un endroit où manger, nous aiguillèrent bientôt en direction de Mont-Dauphin. Cette cité Vauban datant de la fin du XVIIe siècle coiffe un promontoire rocheux cerné de gorges creusées au fil des siècles par la Durance et le Guil.
Après un déjeuner tardif à la terrasse d’un café de Mont-Dauphin, nous avons parcouru les rues baignées de soleil de cette ancienne ville de garnison, jusqu’à que la chaleur nous pousse à chercher un endroit où se baigner.
Les souvenirs me revinrent à l’esprit d’une source d’eau chaude près de Mont-Dauphin dans laquelle je m’étais baignée avec mon frère et mes sœurs.
2. Sources thermales du Plan de Phazy
A 5 minutes à peine de route de Mont-Dauphin, les sources thermales du Plan de Phazy se trouvent juste en retrait de la N94.
Les lieux n’ont guère changé depuis la fin des années 1980. Sous la Rotonde, l’eau chaude (27°C toute l’année) jaillit d’un rocher de marbre rose local et s’écoule dans quatre bassins circulaires en béton, se refroidissant au fur et à mesure qu’elle descend. Sa haute teneur en minéraux a créé un pré salé aux alentours, un environnement rare si loin du littoral et à une telle altitude (900 mètres).
Les sources chaudes de Phazy sont réputées depuis l’Antiquité pour leurs propriétés curatives pour toutes sortes d’affections, mais toute tentative pour y créer un établissement thermal ont été en vain. Le site est désormais géré en indivision par les communes de Guillestre et Risoul, avec accès libre pour le public toute l’année. Ce dont les graines de chêne ont bien profité !
3. Lac de Rama
Notre premier jour dans les Alpes tirait à sa fin. Après une troisième baignade, cette fois dans les flots rapides et limpides de la Durance, le soleil dessinait déjà de longues ombres dans la vallée. Quant au camping, il était à près d’une heure de route.
Malgré tout, nous avions juste passé la Roche-de-Rame quand nous avons tourné à gauche pour trouver un dernier lieu de baignade.
Les indications excellentes du livre Baignades Sauvages en France (lien partenaire) nous conduisirent au bout d’une route étroite au fil de la Durance, pour aboutir au Site de Rame. Le lac promis demeurait invisible.
Une fois la voiture garée au bord de la piste poussiéreuse, nous sommes partis à pied à travers buissons et bouleaux, jusqu’à ce qu’une gemme apparaisse devant nos yeux ébahis.
Blotti entre les sommets de la vallée de la Durance, le lac de Rama capturait les derniers rayons du soleil de fin d’après-midi en un camaïeu étincelant de bleus et de verts. J’ai adoré ce lac aux allures de trésor caché : son écrin de montagnes, ses couleurs lumineuses, et bien sûr son eau cristalline.
Comme le silence de la tombée du jour descendait sur les eaux calmes du lac, notre première journée de baignades sauvages dans les Alpes prenait fin.
4. Lac Laramon & Lac du Serpent
La baignade suivante eut lieu au terme de notre première randonnée familiale dans les Alpes. Une balade longue et raide dans une chaleur étouffante, jusqu’aux lacs Laramon et du Serpent, dans la haute vallée de la Clarée.
Si je m’inquiétais que cette région alpine tant aimée ne s’avère pas à la hauteur de mes souvenirs d’enfance, mes craintes eurent tôt fait de disparaître.
Les montagnes paraissent plus vivantes encore qu’il y a 30 ans. Les villages de la vallée de la Clarée semblent prospérer, et rares sont les chalets isolés laissés à l’abandon. Malgré l’afflux croissant de visiteurs dans cette vallée à la beauté si fragile, la circulation automobile et le stationnement sont bien gérés, à l’aide de parkings gratuits et de navettes en bus. Les sentiers de randonnée sont bien entretenus et balisés, et aussi très fréquentés. Pourtant, ils sont rarement bondés, et les déchets et détritus brillent par leur absence.
Clarée la bien nommée
Partout, les montagnes de la vallée de la Clarée grouillent de vie. Haut, très haut au-dessus des pics du massif des Écrins, des aigles royaux (Aquila chrysaetos) tournoient, virent et louvoient majestueusement dans l’azur du ciel.
De temps à autre, le sifflement puissant d’une marmotte (Marmota marmota) résonne entre les pentes escarpées et les alpages où elles creusent leurs terriers. Partout, des fleurs sauvages frissonnent sous l’effet de la brise : de délicats campanules bleus (Campanula alpestris), de grandes gentianes jaunes (Gentiana lutea) et des joubarbes roses (Sempervivum) parmi les rochers et la verdure des alpages.
Tout au long de la vallée, la Clarée bien nommée clapote gaiement entre des brassées d’épilobes en fleur et des bosquets de mélèzes. Ou alors elle cascade bruyamment au fil des rochers dans des gorges étroites.
Malgré les efforts haletants de la montée (ce n’est qu’à mi-chemin que nous avons réalisé que le manque d’oxygène en altitude y était sans doute pour quelque chose !), nous avions l’impression de marcher dans un décor de cinéma.
Puis cette sensation en atteignant enfin le sommet, après deux heures hors d’haleine à gravir un sentier à l’oxygène raréfié, et tu te retrouves une nouvelle fois à bout de souffle à cause de la beauté ineffable de ce monde.
Puis nous nous sommes baignés dans ce décor de cinéma ! Vous avez bien lu : Brian et moi avons nagé dans le lac Laramon, à une altitude de 2359 mètres, rien que ça !
“Vous êtes un peu fous…” murmura Jedi comme je lui passai mon appareil photo pour qu’il capture ce moment. D’autres marcheurs avaient retiré leurs chaussures et retroussé leur pantalon avant de s’avancer prudemment dans l’eau. Nous étions les seuls nageurs. A part un chien, à l’autre bout du lac.
Après la chaleur de la randonnée, l’eau délicieusement fraîche eut l’effet d’un baume réparateur sur ma peau en sueur et maculée de poussière.
Sans lunettes de piscine, impossible d’observer ce que recelaient les profondeurs cristallines du lac Laramon. Mais le panorama d’exception compensa plus que largement. De la surface de l’eau, le lac Laramon ressemblait à un bassin à débordement, délimité seulement par les montagnes et le ciel.
Du lac Laramon, il ne fallut guère qu’une demi-heure pour atteindre le lac du Serpent. Ecureuil et Sirène s’avancèrent dans les flots verts, mais sans réussir à se tremper complètement.
Comme le soleil jouait à cache-cache avec les nuages, la longue descente commença. A engranger d’autres souvenirs de famille pour ajouter à ma collection. Ces vacances dans les Alpes tenaient leurs promesses de la façon la plus spectaculaire qui soit.
5. Lac des Béraudes
Nous étions loin de nous douter que notre nouveau record de baignade de haute montagne tiendrait seulement deux jours.
Au quatrième jour de nos vacances en camping en vallée de la Clarée, nous reprenions le chemin de Névache, d’où la navette nous emmena tout au bout de la haute vallée, aux chalets de Laval.
Il avait plu la veille et, bien que le soleil soit revenu, la température avait dégringolé et un vent froid soufflait.
Comme la montée escarpée vers le lac des Béraudes s’amorçait, la légère couverture nuageuse et la brise parurent bientôt agréables. Le sentier des Béraudes ne fait peut-être que 2 kilomètres, mais il comprend un dénivelé de 500 mètres.
Etait-ce à cause de la température plus basse, des nombreuses pauses ou de notre forme physique soudain améliorée ? Aucune idée. Toujours est-il que l’ascension parut moins pénible que la précédente, notamment au niveau de la respiration.
Bientôt, nous passions à l’étage supérieur, sortant de la forêt de conifères pour entrer dans un paysage de haute montagne constitué d’éboulis et de maigre végétation – le royaume de la pierre et de la glace.
Le paysage existait bien avant que nous soyons imaginés.
Il nous a vus arriver.
Robert Macfarlane, The Wild Places
J’expliquai bientôt à Jedi que l’immense vallée qui s’étendait en contrebas était une vallée glaciaire, aux contours polis et sculptés pendant des millénaires par des glaciers gigantesques, qui avaient laissé une traînée de rochers en se retirant à la fin de la dernière glaciation. Il parut aussi perplexe que je l’étais il y a trente ans quand mon père m’avait donné la même explication.
Comme nous gravissions à grand peine la section la plus pentue du sentier rocailleux, le soleil finit de dissiper les derniers bancs de brume.
N’ayant vu aucune image du lac avant notre rando, je ne savais pas à quoi m’attendre.
Rien ne vous prépare à ça. Comme vous gravissez le dernier tronçon sur le verrou glaciaire, au-delà du panneau jaune, le Lac des Béraudes vous prend totalement à dépourvu.
Les eaux lumineuses du lac ont gardé la couleur du glacier dont il est né : bleu glacial. Avec l’apparence et l’opacité d’une turquoise véritable.
Le lac des Béraudes est une pierre précieuse dans un paysage minéral. Rude, impitoyable – un lieu sauvage où vent, neige et glace règnent en maîtres.
“Waouh ! C’est le plus beau lac du monde !”
Sirène qui, quelques minutes auparavant, se sentait incapable de faire un pas de plus, oublia en un instant toutes ses misères. Le lac des Béraudes était la récompense idéale pour une deuxième randonnée ardue dans les Alpes.
Nous avons pique-niqué sur un gros rocher plat qui fit office de table.
Une fois restaurés, nous avons poursuivi le long du rivage. Brian avait déjà décidé d’aller se baigner. Quant à moi, malgré le soleil, j’avais du mal à me réchauffer et choisis de passer mon tour.
Brian était en train de se changer quand deux marcheurs arrivèrent dans la direction opposée. “Courageux !” lancèrent-ils en poursuivant leur chemin.
Quelques minutes plus tard, ils applaudirent bruyamment comme Brian s’enfonçait dans les eaux turquoise du lac des Béraudes.
Y’a pas baignade plus sauvage que ça !
Une fois Brian séché et rhabillé, nous sommes repartis le long du lac. Nous avions repéré un petit névé à l’ombre sous un promontoire rocheux.
Y arriver s’avéra plus difficile que prévu : pas à pas, de glissade en dérapage, pour traverser lentement le champ d’éboulis instable.
Ecureuil et Caillou s’avancèrent immédiatement sur la neige grise de poussière, le visage empreint de surprise qu’elle soit aussi froide et glissante – comme si la neige en été était différente de celle d’hiver !
Jedi et Brian, bientôt suivis par le reste de la famille, crapahutèrent jusqu’au pied de la cascade qui alimente le lac des Béraudes.
Comme nous resdescendions vers le lac, le vent sembla s’être calmé et le soleil parut plus chaud.
“J’ai presque envie d’y aller…” avouai-je à Brian comme un secret. Puis, “J’y crois même pas que je vais faire ça !”, comme je passais rapidement mon maillot de bain.
L’eau couleur turquoise était indéniablement froide, mais la sensation d’étau qui saisit parfois mes pieds et mes jambes (comme lors de notre baignade post-sauna en mars dernier) était remarquablement absente.
1, 2, 3 et me voilà partie à la brasse dans les flots bleus.
Mettre la tête sous l’eau n’était pas au menu. Si l’eau du lac des Béraudes n’était pas si bleue, elle paraîtrait laiteuse. Car elle n’est pas limpide. Et puis, quant à nager dans un cadre aussi spectaculaire, autant en profiter pour admirer le paysage !
Impossible de ne pas sourire. J’avais réussi !
“Lac des Béraudes – 2504 m” : c’est l’inscription que porte la pancarte jaune plantée au verrou glaciaire.
Brian et moi avons nagé dans ce lac. Une baignade de haute montagne qui sera difficile à battre, si jamais l’envie nous en prenait.
Qui sait, peut-être l’an prochain ? Car il va sans dire que ce n’était là que le début de nos aventures estivales dans les Alpes !
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Waouh… Sans doute l’un des plus fabuleux articles de blog que tu aies écrit. Les commentaires sont très bien écrits, juste ce qu’il faut d’alléchants pour donner envie d’aller explorer ce magnifique coin de France. Quant aux photos, on a juste envie de traverser l’écran pour s’y retrouver..,Merci beaucoup Annette pour ce délicieux moment de voyage par procuration et bises à ta magnifique tribu.